Se perdre pour mieux renaître, le superpouvoir des ruptures

Se perdre pour mieux renaître, le superpouvoir des ruptures

Et si nos ruptures n’étaient pas des fins, mais des débuts ? Séparation, burn-out, deuil… Ces chaos intimes bousculent nos repères. Mais ils pourraient bien tracer de nouveaux chemins, plus justes, plus alignés.
25 August 2025
par Tessa Georges
3 minutes de lecture

Et si nos vies ne se construisaient pas malgré les ruptures, mais grâce à elles ? Amour, travail, santé… Ces chaos intimes bousculent nos repères, mais peuvent devenir des tournants. Guidé·es par les propos de la philosophe Claire Marin dans Rupture(s), explorons comment ces épreuves peuvent redessiner nos priorités et raviver nos engagements. Car dans un monde en quête de sens, apprendre à “composer avec l’éclat” pourrait bien devenir un art de vivre - et de résister.

La vie ne suit pas une ligne droite

Ce qui est rompu n’est pas seulement un lien, c’est un monde”. Voilà comment la philosophe décrit la rupture, une perte de cohérence, une fin de récit. Qu’il s’agisse d’une séparation, d’un licenciement, d’un deuil ou d’un accident, c’est souvent l’image que l’on se faisait de soi-même et de son futur qui vole en éclats.

Notre culture valorise les parcours “lisses” et linéaires : un projet de vie bien ficelé, une trajectoire cohérente. Pourtant, ces récits idéalisés se heurtent de plus en plus aux réalités vécues. “Nous croyons que nous devons avancer en ligne droite, mais la vie emprunte mille détours”, écrit Claire Marin.

Face à la rupture, le plus difficile est souvent de faire face à cette discontinuité, à cette brisure qui contredit les injonctions à la maîtrise, à la performance et à la prévisibilité. Et pourtant, c’est précisément cette faille qui peut révéler d’autres parts de nous-mêmes.

Accueillir le concept de désorientation profonde

Être en rupture, c’est faire l’expérience du vide, de l’incertitude. Mais dans cette désorientation peut naître un espace de création, d’expérimentation, de transformation.

La rupture ne clôt pas le récit, elle en modifie la trame, rappelle Claire Marin. Être en rupture, c’est apprendre à vivre autrement”. Dans un article de Welcome to the Jungle, plusieurs témoignages illustrent cette bascule. Après des évènements difficiles (burn-out, deuil, accident etc.) certain·es choisissent de réinventer leur vie professionnelle pour mieux l’aligner avec leurs valeurs.

L’une d’eux raconte : “Toutes ces difficultés m’ont aidée à sortir de ce que je pensais être ma zone de confort : un tête-à-tête avec ma tablette et mon stylet, depuis le fond de mon canapé.

C’est aussi le cas d’Ophélie, qui, après une rupture amoureuse douloureuse, a quitté son emploi et s’est lancée dans une formation d’agriculture urbaine. Toujours au micro de Welcome to the Jungle, elle raconte qu’elle a trouvé là “un sens nouveau, une manière de reconnecter le personnel et le politique” dans cet autre article.

Loin des “success stories” classiques, ces récits montrent que la rupture, aussi douloureuse soit-elle, peut ouvrir des brèches dans lesquelles d’autres désirs émergent. Ils prouvent que perdre pied peut être le point de départ d’une reconnexion à ce qui compte vraiment.

C’est dans l’épreuve de la rupture que s’éprouve le désir d’un autre monde

Du chaos intime à l’engagement collectif

C’est dans l’épreuve de la rupture que s’éprouve le désir d’un autre monde

La rupture nous confronte à notre vulnérabilité. Mais loin d’être une faiblesse, cette vulnérabilité peut devenir une force relationnelle, un point d’appui pour s’engager autrement dans le monde.

Le chaos personnel agit souvent comme un déclencheur. À travers la souffrance, il révèle l’inadéquation entre ce que l’on vit et ce à quoi l’on aspire. Pour certain·es, c’est le moment d’un réveil : celui d’une insatisfaction plus large, d’un besoin de contribution.

Faire d’une épreuve une vocation, c’est le chemin qu’a emprunté Sophie. Confrontée à plusieurs reprises à la mort, elle en a finalement fait le cœur de son métier. Dans un article publié par Happy End, elle confie : “Vivre un deuil, c’est connaître l’indicible. Et quand on a traversé cette épreuve, on devient capable d’offrir une écoute authentique, qui touche au cœur de la souffrance de l’autre.

Ces transitions, trop peu valorisées, incarnent pourtant une vérité puissante : le moi blessé peut se réparer en se tournant vers l’autre, vers la société. Comme l’écrit Marin : “ce qui fait rupture, fait aussi relation. Car au moment où le sol se dérobe, on tend la main.

Ces parcours montrent que transformation personnelle et transformation sociale s’enchevêtrent. Et dans un monde en mutation, ces bifurcations intimes peuvent devenir les premiers pas d’un engagement plus large. Accueillir les ruptures, c’est peut-être retrouver une boussole. Non pas pour revenir à l’ancien monde, mais pour avancer vers celui qu’on espère.

Pour aller plus loin 

Dans le même esprit, on vous recommande le podcast Émotions de Louie Media, qui explore avec justesse les grandes secousses de nos vies : transitions, pertes, reconstructions, tristesse et espoir.