Autour d’un goûter imaginaire, Emma et Claudia nous racontent comment le Service Civique Solidarité Seniors réunit des jeunes volontaires et des personnes âgées. Une aventure humaine faite de rencontres, d’histoires partagées et de liens précieux qui réchauffent les cœurs de toutes les générations.
Posons-nous quelques instants et vivons ensemble une expérience. Imaginez que vous, lecteurs et lectrices, vous vous installiez confortablement sur le canapé de Chiche, avec à vos côtés, moi-même, en train d’écrire cet article sagement et face à nous Emma et Claudia, toutes deux membres d’Unis-Cité.
Objectif de ce moment ensemble :
- Finir l’assiette de banana bread qui trône au centre de la pièce,
- Et, surtout, écouter Emma et Claudia pour comprendre ce qu’est le “Service Civique Solidarité Senior”
Parce que oui, ces deux jeunes, au-delà d’apprécier le banana bread, sont membre d’Unis-Cité et pilotent donc ce Service Civique Solidarité Senior.
Je commence mes questions, et vous nous servez un peu de jus, si vous le voulez bien ?
Salut Claudia ! Et merci d’être ici avec nous. Comment expliquerais-tu à ma grand-mère ce qu’est Unis-Cité ?
Claudia : Quand je l'explique à une grand-mère, c'est-à-dire assez souvent finalement, je dis que notre association, Unis-Cité, propose aux jeunes de 16 à 25 ans de s'engager 8 mois dans une cause qui leur est chère. Ils peuvent choisir l'environnement, la culture ou encore la solidarité. Et pendant huit mois ils vivent une première expérience en équipe, avec des jeunes de 16 ans qui n'ont pas fait d'études, d'autres qui ont des diplômes, des jeunes avec un handicap aussi, l'idée c'est que tout le monde puisse avoir sa place.
Ok, jusqu’à là c’est très clair. Emma, à toi de faire aussi bien. Ce service civique “Solidarité Senior”, tu nous expliques ?
Emma : Imaginez que cette bande de jeunes super motivé.es décident de dédier une partie de leur temps, 8 mois comme l’a dit Claudia, à rendre la vie de nos aîné.es plus joyeuse et moins solitaire. C'est ça, le Service Civique Solidarité Seniors d'Unis-Cité.
En gros, c'est un peu comme si ces jeunes devenaient les petits-enfants de cœur de personnes âgées. Ils leur rendent visite régulièrement, papotent, jouent à des jeux de société, font des balades, ou même les aident avec des petites choses du quotidien comme les nouvelles technologies (parce que l'ordinateur, c'est pas toujours évident !). L'idée, ce n'est pas de faire le ménage ou de s'occuper des soins, non, c'est vraiment de créer du lien, de partager des moments, de rompre avec l'isolement.
La classe. J’imagine que vous avez pas mal de soutiens ici et là pour pouvoir mettre tout ça en place ?
Claudia : Oui, on travaille avec les mairies, les services d'aides à domicile, et d'autres partenaires. Ainsi nos volontaires en service civique apprennent à travailler en équipe, sont entourés de professionnels et immergés dans des milieux bien différents.
C’est donnant-donnant cette histoire. Reprenez un peu de dessert. Bon… Et ça représente combien de personnes tout ça ? Si on prend un exemple dans la région que tu suis Claudia par exemple ?
Claudia : Cette année, les 47 volontaires caennais de la mission Solidarité Seniors ont fait plus de 1100 visites chez 185 seniors.
Et ailleurs, ça vit aussi j’imagine ? Emma je sens que tu veux dire quelque chose ?
Emma : Oui, aujourd'hui, c’est un peu partout en France oui. Dans plein de villes et de villages. Ces jeunes qu’on appelle les "volontaires" sont formé.es pour bien comprendre les besoins des personnes âgées et pour être à l'écoute. Ils et elles forment souvent des binômes comme le disait Claudia ou des petites équipes pour organiser des animations collectives auprès de plusieurs aînés créant aussi une belle dynamique entre eux.
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Et si on rêvasse un peu sur notre canapé, là tout de suite, si on se projette… Demain ça ressemblera à quoi tout ça ?
Emma : Si ça se développe, j’imagine qu'on pourrait voir encore plus de jeunes s'engager, toucher un maximum de personnes âgées, même dans les coins les plus reculés. On pourrait imaginer des projets où les jeunes et les seniors montent encore plus d’ateliers ensemble – des ateliers cuisine, du jardinage, de la création artistique… Des activités où les savoirs des uns et des autres se rencontrent. L'idée, c'est que ce soit vraiment un échange mutuel, où les jeunes apprennent aussi énormément des seniors.
Je souhaite prolonger avec vous ce petit goûter virtuel si vous le voulez bien. Parce qu’on est bien là, non ? Il y a un truc qui me passionne et me passionnera toujours, ce sont les histoires. En avez-vous une ou deux à nous mettre sous la dent ? Cela me permettra aussi de manger un peu moins de sucre.
Claudia : Il se passe des choses chouettes dans la rencontre intergénérationnelle. Et des choses tout aussi chouettes simplement dans le service civique en tant que tel, dans le collectif solidaire qui se crée, dans lequel les jeunes se sentent en confiance pour expérimenter, tester et se découvrir. Au hasard : cette année Justine et Flavie ont eu un coup de cœur pour André et son chien, pour Yvette et ses histoires, à tel point qu’elles ont fait un podcast ensemble (et elles ont même essayé de faire matcher les deux séniors !!!).
Emma : Des belles histoires, il y en a tellement ! C'est ce qui fait la richesse de ce dispositif. Il y a celle d'un jeune qui était passionné de jeux vidéo. Il a rencontré un monsieur âgé qui se sentait un peu dépassé par la technologie. Au lieu de juste lui expliquer, le jeune a eu l'idée de lui montrer des jeux simples sur tablette. Au début, le monsieur était sceptique, mais très vite, il est devenu fan ! Ça a ouvert une nouvelle porte pour lui, une façon ludique de stimuler son esprit, et surtout, ça a créé un pont inattendu entre les deux générations, une passion partagée.
C’est ce qu’on appelle “se prendre au jeu” aha ! Excusez-moi, je ne voulais pas refroidir l’ambiance…Hm, et quel sens ça a pour vous tout ça, d’un point de vue plus philosophique, voire osons le mot, politique ?
Claudia : Pour ma part j'ai toujours travaillé avec les seniors, et pour moi ils sont drôles, et c'est ça que j'essaie de transmettre aux volontaires : l'envie de rire avec cette génération, et de créer des opportunités pour le faire.
Emma : Derrière tout ça, la philosophie est simple, mais elle est profonde : on ne voit pas le grand âge comme une période de déclin ou de mise à l'écart, mais plutôt comme une étape de vie riche en expériences, en savoirs et en sagesse. On est convaincus que les personnes âgées ont encore énormément à apporter à la société, et qu'il est essentiel de valoriser leur place et de maintenir leur lien social.
Si donc j’enfile vos lunettes, je vais transformer ma vision de ces personnes…
Emma : Complètement. On encourage un regard qui est :
- Respectueux et valorisant : on considère chaque personne âgée comme un individu à part entière, avec son histoire, ses envies, ses besoins. On ne les voit pas comme des personnes dépendantes, mais comme des acteurs de leur propre vie,
- Optimiste et tourné vers l'échange : on croit en la capacité des aînés à continuer d'apprendre, de partager, de s'épanouir. Et on est persuadés que les jeunes ont tout à gagner à échanger avec eux,
- Humain avant tout : l'objectif n'est pas d'offrir un service technique, mais de tisser des liens authentiques, basés sur l'écoute, l'empathie et le respect mutuel. C'est l'humain au cœur de l'action.
En gros, c'est l'idée de dire : le grand âge, ce n'est pas une fin, c'est une continuation, et c'est ensemble, jeunes et moins jeunes, qu'on peut rendre cette période la plus belle et la plus connectée possible.
Ça me touche ce que vous dites toutes les deux ! Allez, finissons avec la question à 1000 dollars, plus personnelle. Vous êtes heureuses aujourd’hui dans cette mission que vous vivez ?
Claudia : Aujourd'hui notre service civique tel qu'il est conçu permet de laisser vraiment la place aux volontaires de proposer des choses, de tester, d'innover, et c'est la seule méthode à laquelle je crois pour aider nos jeunes à prendre confiance en eux et aussi permettre aux seniors de vivre d'autres activités que des lotos vu et revues. Faire naître les idées et aider à les concrétiser, voilà ce qui me semble avoir le plus de sens dans cette mission. Cette année par exemple, Sarah, une de mes volontaires, avait envie de faire du jardinage avec les seniors et a inventé un atelier terrarium. Lisa, elle, adorait faire les ongles et a lancé un atelier manucure. Adèle enfin, avait envie d’animer des jeux télévisés : les douze coups de 10h sont nés !
Emma : Ce que j'aime par-dessus tout dans cette mission, c'est de voir à quel point tout est “gagnant-gagnant”, tu as dit “donnant-donnant” tout à l’heure, ça marche aussi. Ce n'est pas juste “des jeunes qui aident des vieux”. C'est bien plus que ça. Ce que j'ai toujours trouvé fascinant, c'est de voir comment les jeunes, au début parfois un peu hésitants, se transforment au contact des seniors. Ils développent une patience incroyable, une écoute que peu d'endroits peuvent leur apprendre. Ils découvrent des histoires de vie fascinantes, des anecdotes sur l'histoire de notre pays qu'aucun livre ne peut leur raconter. Ils apprennent le respect, la compassion, et souvent, ils se découvrent une vocation pour les métiers du lien social, ou simplement une meilleure compréhension de la vieillesse.
Et les seniors, alors là, c'est magique ! On voit des visages s'illuminer, des sourires réapparaître, des personnes retrouver l'envie de parler, de s'habiller, de sortir. L'arrivée de ces jeunes apporte une bouffée d'air frais, de la vitalité, et surtout, le sentiment précieux de ne pas être oublié. C'est cette alchimie intergénérationnelle qui me touche énormément. C'est l'idée que chacun donne et reçoit, et que, finalement, ce sont des liens humains forts, sincères et inattendus qui se créent !
Gardons ces mots en guise de conclusion. Du lien, du lien et encore du lien. Merci à toutes les deux et longue vie à Unis-Cité et au banana bread.