Des Jeux Olympiques durables… cela sonne presque comme un oxymore, et pourtant c’est la promesse faite par la ville de Paris lors de sa candidature. Les grands événements internationaux sont de puissants leviers pour façonner une ville mais il n’avait jamais été envisagé que leur impact écologique puisse être positif tant les précédentes éditions s’étaient illustrées par leurs gaspillages, leur démesure et leur finalité commerciale.
Il reste 6 ans pour atteindre et dépasser l’ambitieux programme écologique conçu par Monsieur Lachaze. L’enjeu dépasse le simple momentum des jeux et consiste à laisser en “héritage” des infrastructures, des structures économiques, des habitudes et des écosystèmes circulaires pour le grand Paris. C’est dans cette perspective que l’on vous propose, que vous soyez pour ou contre les jeux olympiques, de vous mobiliser concrètement pour que la transition circulaire promise pour les JO de Paris 2024 devienne réalité.
Le 21 Décembre 2017, Future of Waste a organisé une table ronde avec 3 intervenants dont les principaux arguments ont été rassemblés en différents enjeux :
- Elisa Javchitz dirige la Maison des Canaux, centre névralgique de l’économie sociale et solidaire en Ile-de-France, elle fait confiance aux acteurs locaux de l’ESS et de l’économie circulaire pour être en msure de mettre en oeuvre le programme écologique imaginé par le comité de candidature.
- Frédéric Vial du collectif “non aux JO” veut faire annuler la participation de Paris aux Jeux Olympiques (comme cela avait été le cas à Denver en 1976) : il juge improbable que les travaux se fassent de manière écologique ou concertée car l’impact du CIO et de ses sponsors ne peut être contrebalancé ou contrôlé par aucun dispositif.
- Cathy Bou a mis en place et documenté la politique environnementale sur le site du Bourget pendant la COP21. Elle insiste sur le fait que les changements ne seront durables que si l’ensemble des prestataires sont accompagnés sur le long terme pour que que les plus vertueux changent d’échelle et que les plus importants adoptent de meilleures pratiques.
Du zéro déchets dans les sites olympiques… un doux rêve ?
Alors que l’Ile de France peine à dépasser 1% de réemploi et 20% de recyclage, la candidature de Paris pour les JO 2024 promettait 80% sur les sites olympiques. Il s’agirait en premier lieu de réduire au maximum les déchets inutiles, comme les nombreux goodies ou moquettes à usages uniques. Il faudra aussi mettre en place des infrastructures et des systèmes de collecte sélective et de recyclage pérenne ce qui n’avait pas été le cas pour la COP21. Cathy Bou qui avait dirigé ces travaux déplore que les nombreux efforts qui avaient été réalisés sur le site du Bourget avec les structures partenaires pour atteindre 73% de recyclage pendant la COP21 n’aient pas été reconduits, ni par les COP suivantes, ni localement à Paris. Les ambitions affichées pendant les jeux ne devraient pas être utilisées comme un effet d’annonce, mais comme un levier pour effectuer une transformation plus profonde et durable.
On peut a minima saluer une performance rare pour un d’événement célèbre pour ses cohortes d’éléphants blancs : 95% des sites olympiques prévus pour les JO de Paris 2024 existent déjà. Les deux bâtiments qui seront construits pour l’occasion devraient être biosourcés, avec une gestion exemplaire des déchets de chantier.
Des achats responsables ?
La Maison des Canaux centralisera les nombreux appels d’offre et appels à projets qui seront émis par le COJO (Comité organisateur) mais aussi par les collectivités à partir de fin 2018. Il est prévu qu’en règle générale à Paris, 20% des marchés publics soient alloués à l’ESS, ce devrait aussi être le cas pour les marchés concernant les jeux olympiques. Si les clauses environnementales sont bien conçues, on devrait ainsi être en mesure d’exclure tout produit à usage unique pour y substituer des services, des produits réutilisables, de seconde main, en location ou a minima recyclables. Deux questions demeurent cependant : qui va rédiger ces appels d’offres ? Est-ce que les clauses sociales et écologiques seront suffisamment explicites pour privilégier les acteurs les plus vertueux ? Il s’agit aussi de s’assurer que les acteurs qui sauront répondre à ces cahiers des charges soient suffisamment solides d’ici 6 ans pour faire face à des prestations de cette ampleur, ou de savoir si les acteurs plus conventionnels seront capables de changer de modèle.
Si les clauses environnementales sont bien conçues, on devrait ainsi être en mesure d’exclure tout produit à usage unique pour y substituer des services, des produits réutilisables, de seconde main, en location ou a minima recyclable.
Pour Elisa de la maison des canaux, l’écosystème des acteurs circulaire de l’ile de France sera prêt. Consulter ici notre base de donnée.
Et le reste de la ville ?
Quand on mesure l’impact environnemental, il est nécessaire de prendre en compte l’intégralité du cycle de vie du produit, de l’extraction des matières premières à la gestion de fin de vie en passant par l’utilisation et le transport. On doit donc aussi questionner l’intégralité de l’impact des jeux, y compris en dehors du pré-carré des sites olympiques. Que sera-t-il proposé dans les gares, les aéroports, les restaurants, les hôtels ou encore les nombreux rassemblements publics ?
Il est peu fait mention de ce qui sera proposé au 3 millions de touristes qui vont affluer dans les rues de Paris et de Saint Denis. Le traitement actuel des grands événements sportifs ou festif en plein air générant un afflux de personnes comme l’Euro 2016, la fête de la musique ou le marathon laisse encore pourtant à désirer
Cathy Bou avait mené pour la COP21 une importante conduite du changement e organisant des rencontres et des formations pour inciter les acteurs économiques par secteur (comme l’hôtellerie par exemple) à mettre en place des bonnes pratiques spontanément et sans contrainte, en allant toucher les convictions de chaque individu au sein de structures différentes. Frédéric Vial reste dubitatif quant à la possibilité de contraindre ou d’influencer les grands sponsors qui auront pour finalité unique de rentabiliser l’argent investi. Elisa Javchitz rappelle qu’il ne faut pas s’empêcher d’être ambitieux et qu’en 5 ans, l’usage d’ecocups dans les festivals s’est généralisé, y compris pour ces grands groupes.
Transparence et concertation
Pour obtenir la certification ISO14021 qui est visée, mais aussi effectuer la compensation carbone promise des jeux olympiques (on vise -55% d’émissions de GES en comparaison aux jeux de Londres) les organisateurs devront fournir de très nombreux rapports et mettre en place des outils de mesure qui devraient fournir de nombreuses informations clefs. La transparence peut être un bon outil pour que le médias, les citoyens et les contribuables puissent s’enquérir des résultats accomplis ou des dérives éventuelles.
Sur ce point, M. Vial reste dubitatif. L’opacité de la gestion financière du CIO ainsi que la loi d’extraterritorialité votée dans le cadre de la loi olympique pour protéger avant tout les intérêts des sponsors sont de mauvais signes avant-coureurs. Pire, avec l’échéance et le prétexte des JO, on pourrait expédier les concertations en invoquant l’état d’exception pour décider en chambre de projets urbanistiques plus larges. Si des concertations ont en effet été réalisées en amont, il pense que le dialogue est désormais clos, sauf si les élections municipales viennent rebattre les cartes
La transparence peut être un bon outil pour que le médias, les citoyens et les contribuables puissent s’enquérir des résultats accomplis ou des dérives éventuelles.
Pour Elisa Javchitz , si certains appels restent lettre morte, c’est avant tout parce que la période allant de décembre 2017 à janvier 2018 est en creux, le comité organisateur n’ayant pas encore été constitué et le comité de candidature ayant été dissolu. Il sera en effet bientôt nécessaire que les citoyens exigent des rapports et des résultats concrets et réguliers, à moins que d’autres instances comme par exemple un comité d’éthique puissent jouer le rôle de garde-fou.
Mobilisation citoyenne
Le CIO qui gère des sommes colossales et se verse de coquets salaires, réclame 32 000 bénévoles. Chez Future of Waste, on vous propose plutôt de vous engager avec 10 actions simples, dès maintenant pour faire en sorte que, que vous soyez pour ou contre les JO, Paris sorte plus circulaire de cette épreuve.
Envie de passer à l’action ?
> Posez des questions sur les déchets aux comités organisateurs, aux politiques et aux sportifs qui soutiennent la candidatures, au sponsors et aux journalistes
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> Si vous êtes francilien.ne, écrivez à vos élus pour leur demander comment ils comptent s’inspirer de la dynamique durable suscitée par les JO pour rendre leur juridiction plus circulaire
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