Ils «ne bossent pas» et «bloquent toute avancée environnementale» : le piètre bilan des Républicains au Parlement européen

Ils «ne bossent pas» et «bloquent toute avancée environnementale» : le piètre bilan des Républicains au Parlement européen

La droite française n’imprime plus à Bruxelles. En revanche, elle appartient au groupe le plus puissant du Parlement, qui s’oppose de plus en plus aux efforts de transition écologique en Europe.
15 May 2024
par Vert, le média qui annonce la couleur
3 minutes de lecture

Pas fantôme, mais presque, la droite française n’imprime plus à Bruxelles. En revanche, elle appartient au groupe le plus puissant du Parlement, qui s’oppose de plus en plus aux efforts de transition écologique en Europe.

Depuis les premières élections européennes en 1979, le Parti populaire européen (PPE) a dominé le Parlement européen sans discontinuer. Alors que les projections de vote prévoient bien des bouleversements, son poids dans le prochain hémicycle devrait, lui, rester remarquablement stable après les élections de juin — environ 25% des sièges.

Une question demeure entière à ce stade : avec qui le PPE s’associera-t-il au moment de se prononcer sur de prochaines réglementations environnementales ? Car sur ce sujet, le parti a largement changé de position en cours de mandat.

Des marches pour le climat…

Il y a d’abord eu, en 2019, le lancement du Pacte vert européen par la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen, elle-même membre du PPE. Ce paquet de près de 70 textes vise à transformer l’économie du Vieux continent pour diviser par deux les émissions de gaz à effet de serre dès 2030 (par rapport à 1990) et atteindre la neutralité carbone en 2050.

«Le PPE n’a pas forcément bien vécu le fait qu’Ursula von der Leyen mette le Green deal au cœur de son programme», rappelle Caroline François-Marsal, responsable Europe au Réseau action climat. «Mais à l’époque, la pression de la société civile était forte, notamment avec les marches pour le climat.»

Aux côtés de la gauche et des écologistes, le PPE soutient alors des objectifs ambitieux sur le développement des énergies renouvelables ou les efforts d’efficacité énergétique. Il vote également l’instauration d’une taxe carbone aux frontières de l’Europe ou la réforme du marché européen du carbone, qui aboutit à augmenter le prix des «droits à polluer».

… à la colère des agriculteurs

Mais, en cours de mandat, «il y a eu un renversement politique total», expliquait l’écologiste Marie Toussaint à Vert, il y a quelques semaines. «La droite s’est mise à pactiser avec l’extrême droite et on est passé des petits pas aux grands reculs», détaillait-elle.

«Les votes du PPE sont de plus en plus convergents avec ceux de la droite ultra-conservatrice et extrême», confirme Caroline François-Marsal. Cette alliance s’est concrétisée lors du vote sur la fin de la vente des voitures thermiques neuves à partir de 2035 ; la droite et l’extrême droite ont voté contre, sans parvenir à faire échouer le texte pour autant. En revanche, sur les sujets liés à l’agriculture, elles ont obtenu le rejet du règlement sur la réduction des pesticides et vidé de leur substance les lois sur la restauration de la nature ou les émissions des élevages industriels.

«Ils ont fait de l’agriculture un sujet de campagne, allant contre toutes les avancées environnementales», constate Caroline François-Marsal. «La récupération politique est presque évidente», confirme Phuc-Vinh Nguyen, chercheur en politique européennes de l’énergie à l’Institut Jacques Delors. «Il y a cinq ans, ce qui avait marqué la campagne, c’étaient les jeunes de Fridays for future [à l’origine des grèves pour le climat, NDLR]. Aujourd’hui c’est la colère des agriculteurs.»

Des Républicains encore plus conservateurs

Sur cet échiquier européen, les huit eurodéputé·es issu·es de la droite française pèsent «objectivement peu», confient plusieurs spécialistes interrogé·es par Vert. Du reste, «ils ne bossent pas» et ont des indicateurs de participation extrêmement faibles sur les sites recensant l’activité des parlementaires. Les ex-lieutenant·es de la Sarkozie — Nadine Morano ou Brice Hortefeux — sont particulièrement visés, «qui prennent le Parlement pour un placard doré», glisse un expert en off.

Les votes des eurodéputé·es LR les révèlent arrimés aux préoccupations françaises plutôt qu’aux enjeux européens. Prenant le contre-pied du PPE, les Républicains n’ont pas soutenu la directive portant sur le déploiement des énergies renouvelables, y voyant une concurrence à l’électricité nucléaire en France. «Dans la logique de droitisation du parti en France, ils se sont montrés de plus en plus conservateurs par rapport au reste du PPE», ajoute Phuc-Vinh Nguyen. Il est loin, le temps des marches climat.

Les Républicains n’ont pas donné suite à nos demandes d’interview.

Article écrit par Anne-Claire Poirier. Vert, le média qui annonce la couleur

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