Brancher un appareil dans une prise, rien de plus facile ! Mais quand on a 75 ans et de l’arthrose, la tâche se complique. Pourtant, de petites améliorations suffisent souvent à se simplifier la vie. C’est justement le rôle d’Adaptia, réseau de plus de 250 ergothérapeutes spécialisés dans l’aménagement du domicile des personnes âgées. Cette année, le projet est lauréat de l’appel à projets “Bien vivre sa retraite, le plus longtemps en autonomie” porté par l’Assurance Retraite Île-de-France et AG2R La Mondiale. Rencontre avec Charlotte Le Blan, cofondatrice.
Si vous deviez pitcher votre projet à vos grands-parents, ça donnerait quoi ?
Chez Adaptia, nous nous appuyons sur l’expertise d’ergothérapeutes pour aménager le domicile des personnes âgées. Notre objectif est qu’elles restent le plus longtemps possible chez elles, pour plus de sécurité et de confort. Etant donné que l’ergothérapie n’est pas couverte par la sécurité sociale, nos clients sont surtout les villes, les départements et les bailleurs sociaux qui prennent en charge cette prestation. Nous sommes principalement implantées en Île-de-France, mais aussi en région et en Guyane depuis peu !
Es-tu toi-même ergothérapeute ?
Pas du tout ! J’ai travaillé dans la banque pendant 19 ans. Au bout d’un moment, j’ai eu envie de trouver plus de sens dans mon activité. C’est alors que ma belle sœur Constance, ergothérapeute spécialisée dans le maintien à domicile des personnes âgées, m’a proposé qu’on s’associe pour monter un réseau. C’est tombé à pic ! On est très complémentaires : elle apporte son expertise métier et de mon côté je gère les budgets, les dépenses et toute la partie commerciale. Aujourd’hui, j’ai réellement le sentiment d’être utile.
Tu nous expliques ce qu’est un ergothérapeute ?
L’ergothérapeute est le spécialiste de l’autonomie au sens large. Il peut aussi bien rééduquer les personnes dyslexiques, donner des conseils de posture en EHPAD ou réadapter un logement. Son objectif est de maintenir l’autonomie des personnes, ou de leur en faire retrouver. Pour ce faire, il utilise des techniques de compensation : des objets ou des travaux qui pallient la perte d’autonomie. Pour commencer, il pose des questions à la personne comme Qu’est-ce que vous aimez faire ? Qu’est-ce que vous avez l’habitude de faire ? et fait des mises en situation dans son logement. Il rationalise aussi le rangement au maximum pour éliminer les risques de chute. Car quand on chute une fois, le risque de rechute est élevé. L’important, c’est de ne pas chambouler les habitudes ni de changer toute la configuration de la maison.
Si demain vous rencontrez ma grand-mère, comment vous y prendrez-vous ?
Si elle adore un fauteuil en particulier, on va lui demander comment elle s’y assoit et comment elle s’en relève. Souvent, les fauteuils sont très bas il s’agira de les surélever. On va aussi lui demander comment elle rentre dans sa baignoire. Selon les réponses, on suggérera un siège de bain pour pivoter et s’asseoir facilement, un robinet spécial, ou même de casser la baignoire pour construire une douche adaptée. En fait, il y a tout un tas de techniques selon les situations : des rehausseurs de prises de courant, des tire-chaussettes, ou tout simplement des veilleuses pour éviter de chuter quand on se lève la nuit !
Vous serez accompagnées pendant 12 mois par l’Assurance Retraite Île-de-France et AG2R La Mondiale. Qu’attendez-vous de cet accompagnement ?
Récemment, on est devenu opérateur des ateliers du PRIF. C’est vraiment génial de pouvoir compléter le dispositif existant, ça nous permet de toucher un maximum de personnes. La dotation va aussi nous permettre de financer la pièce de théâtre que nous créons en partenariat avec la compagnie Naje. Celle-ci portera sur l’adaptation des logements et se basera sur les témoignages d’aidants familiaux et salariés, de villes et de seniors. En plus, elle sera suivie d’un atelier avec un ergothérapeute. On est très heureuses de parler de ce sujet via ce biais car on ne va pas se mentir, l’adaptation des logements n'est pas le sujet le plus sexy du monde !
Quelles sont les prochaines étapes pour Adaptia ?
Il y en a plusieurs ! En ce moment, on est en plein dans notre étude d’impact et on se concentre sur la pièce de théâtre. On espère la présenter dans le plus de villes possibles. Ensuite, l’animation des ateliers du PRIF sera le gros challenge de la rentrée. Les ateliers et conférences reprennent en présentiel dans toute l’Île-de-France, et s’intensifieront notamment pendant la Semaine Bleue. En parallèle, on recrute un ergothérapeute et une personne pour nous aider sur toute la partie administrative.
Bien vieillir, ça tient à quoi ?
À la pluridisciplinarité. Une personne âgée a besoin d’être accompagnée de façon globale : par un médecin bien sûr, mais aussi par un kinésithérapeute, un ergothérapeute, de la gym douce, sa famille… Par exemple, c’est génial si un·e senior se fait soigner sa hanche douloureuse. Mais si il·elle est seul·e chez lui·elle et sans lien social, on n’aura fait que la moitié du chemin. Il y a beaucoup de progrès à faire pour que les acteurs du bien vieillir travaillent ensemble et pas en silo.
Quelle est ta vision de la retraite ?
Pour moi, c’est rester autonome le plus longtemps possible et vivre comme je l’entends, sans être infantilisée. Ce qui compte, c’est de continuer à faire les choses qu’on aime. La retraite, ce n’est pas que des tracas !