Ces assos qui aident les personnes sans papiers

Ces assos qui aident les personnes sans papiers

Ce sont les personnes qui assurent l’entretien de nos bureaux, qui cuisinent nos repas, qui surveillent nos bâtiments… Comment aider les personnes sans papiers à se faire une vraie place dans notre société ? Panorama des associations.
14 December 2023
par Vianney Louvet
6 minutes de lecture

Il y a tant à faire dans ce bas-monde, mais surtout tant de monde à rencontrer, à découvrir, tant d’histoires à lire, à écouter, à partager. On vous propose ici un petit panorama de ceux et celles qui arrivent sur le sol français et font face à une précarité dramatique. Quelles sont les associations qui aujourd’hui ouvrent des espaces de chaleur humaine et d’inclusion ? 

Des travailleurs sans-papiers marocains manifestent pour se faire reconnaître par la société Veolia, le 28 août 2023 à Paris. Crédit : InfoMigrants

Des travailleurs sans-papiers marocains manifestent pour se faire reconnaître par la société Veolia, le 28 août 2023 à Paris. Crédit : InfoMigrants

D’où ça vient l’expression “sans papiers” ?


Commençons par le commencement. Une personne dite "sans papiers" est une personne étrangère habitant en France et ne possédant pas de titre de séjour.

Faisons une courte parenthèse historique. Un jour quelqu’un, des gens, ont donc dit : “Dis-donc Hervé, viens nous voir. Avec les copains, on voulait te dire qu’à partir de maintenant, t’as plus le droit de vivre ici. Attends, on va tracer une zone avec une craie. Voilààà. Tu vois : de là, à de là, c’est chez nous. Si tu veux entrer, faut que tu fasses une sorte de jeu de piste hyper nul qui va te prendre un max de temps et être très douloureux, aussi”. Mais dans les faits ça s’est passé comment ?

Il faut remonter au à la fin du XIXe siècle, pour trouver les premières mesures définissant ces conditions du « droit au séjour » de personnes étrangères. Plus tard, les luttes pour la justice sociale ont fait émerger ce terme de “sans papiers”, notamment dans les années 1970 lors des manifestations contre les circulaires Marcellin-Fontanet. Aujourd’hui, la reconnaissance par l'administration du droit de quelqu’un de rester temporairement dans un pays, ce fameux “titre de séjour” est devenu une règle encore largement débattue. Certains la trouvent scandaleuse, d’autres insuffisante, en témoignent les débats sur le projet de loi Asile - Immigration en ce moment à l’assemblée.

Lutter pour exister

La lutte pour l’égalité n’a pas été que vaine. Des régularisations massives, il y en a eu : 130 000 en 1981-1982, puis 76 500 en 1997-1998. Des luttes emblématiques, il y en au aussi : la grève des sans-papiers de l’église Saint Bernard (1996) ou plus récemment la grève des femmes de ménage de l’hôtel Ibis des Batignolles à Paris (2019). À chaque fois, les mobilisations s’attachent à demander des régularisations, certes, mais aussi à mettre sur le devant de la scène ces invisibles qu’on ne verra jamais au 20h de TF1. Éboueurs, livreurs, manutentionnaires, ouvriers du bâtiment, femmes de ménage… Ceux et celles que la Covid a pointés comme “essentiels” ont vite retrouvé les coulisses de notre monde. 

Et ils et elles sont nombreuses. Aujourd’hui on pourrait débattre longtemps du nombre précis sur les personnes en situation irrégulière en France. Deux points là-dessus : 

  • Peut-on arrêter de dire “en situation irrégulière” et dire “en situation considérée comme irrégulière” ? Juste pour rappeler que ce n’est pas un fait admis de tous ?
  • Le chiffre est très compliqué à définir et on va dire que quel que soit ce nombre, on a envie de se poser une autre question : que vivent ces personnes que l’on réduit à des documents, des titres, des procédures ? Et si on quantifiait la dureté de leur quotidien plutôt que leur nombre ? Parler de chiffres, c’est facile, parler de vies, c’est tout de suite plus complexe. 

Agir aux côtés des personnes sans papiers : mission impossible indispensable 


Découvrir ceux et celles qui agissent aux côtés des personnes sans papiers, cela donne de l’espoir, l’envie de les rejoindre. Nous avons farfouillé et avons trouvé quelques organisations (parmi tant qui existent) qui proposent aujourd’hui d’apporter d’une manière ou d’une autre un soutien dans la lutte aux côtés de ces personnes que certains ne veulent pas inviter à la fête. 

  • La Cimade, la bataille sur le terrain est aussi politique

Fondée juste après la début de la Seconde Guerre Mondiale par des mouvements de jeunes protestants, dont certains étaient scouts, la Cimade (dont l’acronyme provient de “Comité inter-mouvements auprès des évacués” si tu veux tout savoir) est une association qui soutient notamment les étrangers en situation irrégulière (en plus des personnes réfugiées ou des migrants par exemple).

C’est une histoire sympa. Le 13 novembre 2015, une famille rentre de Calais et décide de créer Utopia 56. Yann Manzi notamment, est à l’époque régisseur de camping pour les Vieilles Charrues. Utopia 56 a une mission : aider les étrangers considérés en situation irrégulière, notamment par l’installation des campements.

Rejoindre Utopia 56, c’est prendre du temps pour faire de l’accompagnement social, de la collecte de dons matériels, des maraudes de jour et de nuit. Leurs antennes sont présentes un peu partout (Calais, Grande Synthe mais aussi Lorient, Tours ou encore Toulouse).

La maison des réfugiés

La maison des réfugiés

C’est une vidéo de Flavia Coelho qui présente “La Maison des réfugiés” sur leur site. Et cela illustre parfaitement ce qu’est ce lieu. Un lieu qui accueille, qui prend soin, qui chante, qui crée du lien. 

Formation professionnelle, sport, concerts, tout ça à destination de tous ceux et celles qui franchissent les portes de ce lieu. Et alors les étiquettes migrants, demandeurs d'asile, réfugiés ne sont plus l’essentiel. Pilotée par Emmaüs Solidarité, la maison a un slogan : “Pour accueillir il faut une demeure”. 

Tous les jours, ce sont quelque 300 personnes en situation de vulnérabilité et de précarité que Les amarres soutiennent et accueillent. Ce tiers-lieu situé dans les anciens locaux des Ports autonomes de Paris est un lieu où, encore une fois, l’ambiance est fofolle. Allez tester la buvette solidaire et ses événements festifs et culturels si vous ne nous croyez pas. 

À noter que le lieu et ses 4 000 m² abrite 20 organisations de l’économie sociale et solidaire, agissant au quotidien pour ce grand et noble mot qu’est la justice sociale. 

  • Le JRS, passer un bon moment, tout simplement

Cela peut paraître être de l’ordre du détail, ça n’en est pas un. “Être aux côtés” lit-on sur le site du JRS, le Jesuit Refugee Service. Et c’est bien de cela dont il s’agit. Vivre un moment, se parler, jouer, faire un foot, sans “faire sa bonne action”, sans “aider l’autre” mais juste en prenant du plaisir d’être en lien. 

JRS France lutte tous les jours contre l’isolement et l’exclusion sociale des demandeurs d’asile et des réfugiés. Face aux grands discours qu’on entend sur CNews, quoi de mieux qu’un petit Skyjo avec chocolat chaud ?


L'association Kabubu

Une asso et 4 piliers : l’inconditionnalité de l’accueil, le collectif et l’horizontalité, la collaboration et la complémentarité et enfin l’indépendance (notamment sur la prise de décision). 

Eux et elles, cela fait un bout de temps qu’ils agissent sur le terrain, 1994 pour être exact. Leur mission est proche de ce qu’on a présenté chez certaines autres assos : aider les personnes en situation de précarité et d'exclusion sociale en proposant des activités culturelles, des formations, des rencontres, etc. 


  • Kabubu, coup d’envoi du match de l’inclusion

On les aime bien chez makesense, Kabubu. Et si vous n’en avez encore pas entendu parler, le mieux c’est d’aller faire un basket avec eux et elles et vous comprendrez vite l’état d’esprit. C’est fou ce que le sport et quelques ballons peuvent faciliter le lien. Et c’est à partir de ce constat tout simple que se lance Kabubu, en 2018. 

L'inclusion sociale et professionnelle pour les personnes exilées à travers le sport, voilà ce qu’est Kabubu en une phrase. Et ce mot, ça vient d’où ? Du swahili. Cela décrit un “état d’esprit favorisé par les rencontres et l’amitié, se nouant autour de la pratique sportive” lit-on sur leur site. Au passage, c’est aussi un type de lutte traditionnelle congolaise. On en apprend tous les jours. 


  • La Lueur, et puis j’ai vu de la lumière

Toute jeune, toute pimpante cette asso. La Lueur accompagne les personnes en situation de migration afin de les aider dans leur régularisation et sortie de la précarité. Le petit bonus : tout cela se passe à Marseille et met une attention particulière à travailler sur les souffrances très concrètes liées au quotidien des personnes, que ce soit dans le domaine du logement, de la santé, ou encore de la psychologie. 


Vous en voulez plus ? Allez voir Amnesty International France, Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé), la Croix-Rouge française bien-sûr, France Terre d'asile, Forum Réfugiés, les Groupes accueil et solidarité (GAS), et d'information et de soutien des immigrés (Gisti), la Ligue des droits de l'Homme (LDH) ou encore le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP).