Contes Rendus, quand les générations se font des films

Contes Rendus, quand les générations se font des films

Voilà une idée qui va égayer les repas de famille : l’association Contes Rendus vous propose de collecter les souvenirs de vos ainé·es en les filmant. 
19 December 2022
4 minutes de lecture

Voilà une idée qui va égayer les prochains repas de famille ! À l’occasion de retrouvailles avec nos aînés, entre deux « et je t’ai raconté l’histoire de … ? », l’association Contes Rendus propose à toutes et tous de collecter les souvenirs de nos grands-parents, oncles ou tantes en les filmant. 

C’est l’histoire d’un projet personnel qui, chemin faisant, se transforme en une association aux centaines de contributeur.rices. Cette histoire, elle démarre en 2018. Louis-Xavier Leca se lance alors un défi : retracer des fragments de vie de ses grands-parents, « des paysans, des gens de la terre, très éloignés de [son] quotidien de parisien ». Le dispositif est simple, il s’arme d’un téléphone (ou d’une caméra, l’histoire ne le dit pas), il pense aux questions qui l’ont toujours turlupiné et il ose les poser à ses grands-parents, face caméra. 

« Mes grands-parents me racontent des histoires depuis que je suis petit. Je leur propose de les filmer, pour mes enfants plus tard. Parce qu’elle est filmée, ma grand-mère me raconte des histoires un peu différemment, avec une nouvelle tonalité, une nouvelle passion. C’est émouvant. Puis je publie la vidéo. Ma grand-mère tombe dessus et se voit sur les réseaux. Elle a l’impression d’être une star de ciné. Elle est valorisée, elle en parle à ses copines. » 

Habitué des initiatives solidaires – il a notamment fondé La Cloche, une association qui crée du lien social avec et pour les sans-abris -, Louis-Xavier pressent que ces vidéos sont en fait « un prétexte au lien. Un prétexte pour pousser les gens à se rencontrer, à passer du temps ensemble ». 

Quatre années plus tard, son idée a fait des petits : l’association Contes Rendus, qui vise à archiver, valoriser et diffuser la mémoire de nos aînés. Parce qu’au fond, si cette idée a permis à Louis-Xavier de se connecter encore davantage à ses grands-parents, elle peut nous permettre à nous toutes et tous de découvrir et de partager une histoire commune entre générations.

Fabriquer la mémoire

Alors que la tendance est plutôt au conflit intergénérationnel, Contes Rendus propose à l’inverse d’aller à la rencontre des aînés pour découvrir leur histoire, et à travers eux celle d’un pays, d’une époque, d’un territoire. Ce dispositif a des vertus multiples. Tout en contribuant à créer du lien social, la collecte de ces témoignages constitue un travail de mémoire et d’archive titanesque. « Un peu comme l’INA », ambitionne Ricardo Torres, coordinateur de l’association. « Si tout le monde faisait ça, ce serait une banque de données exceptionnelle. Aujourd’hui, on se filme tout le temps. Retrouver des capsules de l’époque, comment ils vivaient, comment ils parlaient, c’est rare. Une personne qui témoigne d’un bout de vie à cette époque, ça n’existe pas », renchérit Louis-Xavier. 

Enfin, les participant.es de tous bords s’accordent sur une autre raison, et pas des moindres : Contes Rendus rompt les clichés qui peuvent exister entre les générations. À travers tous ces témoignages, la vieillesse dévoile tous ses visages. En miroir, les aînés révisent leur jugement sur la jeune génération, pas si flegmatique qu’il n’y paraît et réellement engagée via de nouveaux outils, notamment numériques. 

Confidences d’hier

Il y a ceux qui ont rencontré des artistes. Celles qui sont nées ailleurs. Ceux qui ont connu l’exil. La guerre. Celles qui ont eu mille vies. Ceux qui n’en ont eu qu’une et c’était très bien comme ça. Contes Rendus recense déjà une centaine de témoignages des quatre coins de la France, récoltés par des bénévoles de plus en plus nombreux. Sur la chaîne YouTube, on découvre Philippe, arrivé en retard pour le tournage d’une interview de U2, Emile, contraint de quitter l’Algérie, et beaucoup d’autres. « Des histoires fantastiques et personnelles », souligne Louis-Xavier. 

Derrière chacun de ces contes, c’est aussi l’histoire d’une amitié nouvelle ou d’un lien renforcé entre deux générations qui n’ont pas toujours l’occasion de se rencontrer. À l’occasion d’un déplacement en Bourgogne pour collecter des contes avec des bénévoles, Ricardo raconte « J’ai rencontré trois aînés, toujours ensemble. J’ai décidé de les approcher et on a pu les enregistrer. Chaque fois qu’on revient en Bourgogne, on passe les voir et manger avec eux ! ». 

À vos caméras !

Vos parents ou grands-parents ont des milliers d’anecdotes à raconter ? Quoi de mieux qu’un petit tournage intergénérationnel entre deux repas de fêtes ? Nul besoin d’être journaliste, réalisateur.rice ou monteur.se pour collecter des contes, l’association accompagne toutes celles et ceux qui veulent se lancer ! 

Pour participer, il faut d’abord contacter l’association via son site ou le portail JeVeuxAider.gouv. Un guide pratique ainsi qu’une courte formation sont délivrés à tous les nouveaux arrivants. Puis, il ne reste plus qu’à identifier une personne sénior, de sa famille ou de son quartier, lui proposer un entretien et l’enregistrer. Un téléphone suffit pour réaliser la vidéo. L’association propose également d’autres missions, comme animer une communauté ou monter les vidéos, pour celles et ceux qui souhaitent prolonger leur engagement. À vos Contes Rendus !