Parce que 44% des jeunes regrettent leurs choix d'orientation, Guennadiy Pak a imaginé Jexplore, une solution tech qui transporte les collégiens dans le monde professionnel en réalité virtuelle. À vos casques !
« C’est parti, allez on y va. » Dans les couloirs de l’hôpital, Sylvain conduit le brancard d’une patiente tout juste sortie de la salle de réveil. « Là ce qui va se passer, c’est que je vous ramène dans votre chambre, je préviens le poste de soin de votre retour, surtout vous restez dans votre lit… On va venir vous voir, prendre des petites constantes et vous donner une petite collation, de quoi vous rassasier, ça fait longtemps que vous n’avez pas mangé… »
Sylvain est là devant nous, le personnel de l’hôpital juste derrière et sur le côté les portes des chambres défilent au rythme des roues du chariot. Le brancardier nous plonge dans son univers fait de soins et d’urgences, nous explique l’organisation de ses journées. C’est palpitant, concret, on y est. En réalité on n’y est pas, on est dans une salle de classe un casque virtuel sur les yeux et c’est bien là toute la magie de Jexplore. Guennadiy Pak a eu l’idée de ce projet pour reconnecter les jeunes avec le monde du travail. « Un jeune sur 2 regrette son choix d’orientation à la fin du bac. Dans certaines professions, les recruteurs ont du mal à trouver de bons candidats et certains métiers restent très peu connus. L’idée de Jexplore est de permettre aux collégiens de s’immerger virtuellement dans un univers professionnel pour se projeter concrètement dans un métier. »
Vis ma vie de…
Pour réaliser les séquences de 4 à 5 minutes chacune, Guennadiy s’imprègne d’abord des expertises du métier, recueille les témoignages des professionnels, se rapproche des entreprises concernées et, grâce au savoir-faire qu’il a développé, scénarise l'immersion pour la rendre pédagogique, vulgarisée et ludique. « Une fois la scénarisation réalisée, on part en tournage avec une idée de ce que l’on va mettre en avant dans le film. On se déplace dans toute la France, c’est hyper varié. On s’est retrouvés dans un bloc opératoire à deux heures du matin, dans une entreprise qui fabrique des parfums depuis 500 ans. Nous aussi on vit des expériences. »
Ces immersions en 3D sont ensuite montées pour permettre aux élèves de voir à quoi ressemble la journée d’un maçon, d’un architecte, d’un feel good manager… « On arrive à faire visiter des lieux habituellement difficiles d’accès : des chantiers, des centrales nucléaires, des hôpitaux. Chaque tournage est un challenge, il nous faut aussi rendre concrets des métiers comme analyste financier ou data scientist.» À ce jour, 40 immersions ont été réalisées dans 15 secteurs. « On continue de se diversifier, dans deux ans on devrait avoir 200 métiers présentés. »
« Pour les métiers en tension, méconnus ou qui souffrent de stéréotypes, les entreprises font directement appel à nous. C’est un bon moyen de les revaloriser. »
Plus fort qu’un forum des métiers
Pour téléporter les jeunes dans ces univers professionnels, Guennadiy et son équipe se déplacent en chair et en os dans les collèges. Équipés de 15 casques de réalité virtuelle, ils proposent une animation bien rodée. « On répartit la classe en deux groupes, un premier plonge dans l’un des 40 univers professionnels grâce aux casques pendant que le second approfondit ce métier en discutant avec un animateur. On fait ça pendant une heure avec plusieurs métiers.»
Depuis sa création en mars 2020, 1500 jeunes dans 30 établissements ont pu accéder à la prestation. Grâce à l’accompagnement de passerelles, 10 000 collégiens devraient y avoir droit d’ici deux ans. Y trouveront-ils une immersion dans le monde de l’entrepreneuriat social de Guennadiy ? « Je passe 50% de mon temps à envoyer des mails, c’est pas très intéressant mais c’est la réalité. Mais je suis aussi à 50% sur le terrain avec les utilisateurs, les clients. C’est un peu cliché mais je n’ai pas de journée-type. Mon boulot est de rendre concret les métiers abstraits, ça pourrait être une bonne idée. » Challenge accepté ?