N’en jetez plus, mode d’emploi pour des buffets vraiment durables

N’en jetez plus, mode d’emploi pour des buffets vraiment durables

Comment organiser un buffet 100% responsable avec des ingrédients qui vous ressemblent ? Tinou livre ses tips.
02 April 2024
par Antoine Delaunay Belleville
6 minutes de lecture

Chouquettes industrielles, jus de fruits du bout du monde, café pas du tout équitable, des poubelles qui débordent… les buffets d’entreprises (ou d’associations, bref les buffets tout court) sont souvent une catastrophe pour la planète et pour le budget. Mais si, au contraire, on les pense durables et sans déchet, là on a gagné. Mode d’emploi pour prendre cette deuxième voie.

Ça me chiffonne toujours un peu quand on parle écologie et qu’un bon tiers de la nourriture prévue pour agrémenter la rencontre finit à la poubelle. Je m’évertue avec ou sans la complicité du traiteur et des organisateurs, à empaqueter, redistribuer, m’empiffrer pour éviter la débâcle… mais si cela n’a pas été pensé en amont, il est déjà trop tard.

J’invite les organisateurs et organisatrices d’événements à consacrer 2 heures (lecture de l’article compris) pour organiser des buffets qui soient responsables en suivant un tutoriel réalisé pour notre événement Vitamine C (notre festival des communautés). Ça vous permet d’envisager un buffet qui soit bon pour la bouche, pour la planète et pour les humains. Un buffet qui respecte la théorie du Donut de Kate Raworth (on vous explique tout en vidéo sur 1 minute, 3 minutes ou 15 minutes, et vous pouvez aussi retrouver les informations sur la page donut du site de 2tonnes).

Pour construire un monde commun qui soit juste et durable il faut naviguer dans le Donuts, au dessus des seuil de justice et en deçà des frontières planétaires.

Le bon choix des produits

Les habitudes ont la vie dure et c’est traditionnellement, une marque de respect que de proposer des mets « prestigieux » comme des viennoiseries, des verrines  ou des petits fours. Mais il est temps de bousculer tout cela si, comme moi, vous pensez que le respect de normes sociales et environnementales doit primer sur les conventions sociales des 30 « glorieuses ».  

Pour mon événement,  j’ai choisi pour le petit déjeuner des aliments faciles à conserver, à redistribuer et qui sont cohérents avec les limites planétaires, notre budget associatif et notre engagement envers une économie sociale et solidaire. 

1/ Merci à Ethiquable qui nous a fourni les jus, les chocolats et le café. Cette coopérative  contribue à des agricultures durables et équitables en payant le prix juste aux producteurs et en accompagnant à la transformation sur place des produits. Le fait que ce soit une SCOP fait écho à nos propres valeurs sur le partage du pouvoir. Pour 140 personnes, on est partis sur 40 tablettes de chocolat et 20 litres de jus de fruit. Même les plus gourmets de nos invités en ont pris plein les papilles. On aurait pu aller plus loin en proposant des ersatz de café  mais on a choisi de ne pas trop brusquer toutes les habitudes en même temps.

2/ On voulait illustrer la théorie du donut, mais le problème c’est qu’on ne pouvait pas proposer une pâtisserie industrielle qui  soit gorgée de colorants et de sucre que ce soit pour la santé, la planète ou le social. Heureusement je me suis souvenu d’un boulanger de Bobigny super réactif qui proposait des pains à des prix imbattables quand on organisait le festival Bellastock avec Disco soupe. Il nous a donc fabriqué des donuts légèrement sucrés rien que pour nous.

3/ Pour agrémenter le donut, on est passé par les confitures re_belles, un atelier d’insertion qui réalise des confitures à base d’invendus et propose des animations cuisine. Le nom de la marque avait été trouvé pendant un atelier de créativité makesense, il y a presque 10 ans maintenant, et il est facile de leur passer commande par lot de 25 pots. L’astuce est de ne pas ouvrir tous les pots en même temps pour pouvoir les conserver pour plus tard ou les offrir comme goodies. 

4/ Enfin, on a proposé des fruits locaux et de saison en passant par nos amis de Miyam, un réseau d’épiceries engagées. Forcément en mars on n’a eu que des pommes ou des poires, mais ça fait partie du jeu que de goûter aux limites de distances et des saisons.

Retrouvez ici une liste de prestataires auxquels vous pouvez faire appel pour vos buffets responsables ! Vous pouvez aussi rajouter des recommandations en remplissant ce questionnaire.

La communication avec les participant·es

Expliquer sa démarche fait partie du buffet réussi. On prendra ici en exemple ce que nous avons fait pour le festival makesense il y a quelques années.. Si vous faites des efforts notables et que ceux-ci peuvent surprendre vos participant·es, prenez le temps de communiquer votre démarche et vos marges de progrès en amont, sans gloriole ni pénitence. Vous pouvez le faire de vive voix sur le moment , accompagné d’un visuel qui explicite les consignes ou par exemple d’une infographie pour expliquer la mesure d’impact à posteriori 

Par ailleurs, le gros du problème vient souvent de la volatilité du nombre de participant·es. On a peur de manquer, alors on met la dose. Pour essayer de viser le plus juste possible, demandez clairement à vos participants s’ils comptent rester pour le buffet parce que vous ne voulez pas gâcher. Ne vous fiez pas juste au nombre de likes sur vos événements Facebook.  Le jour J, ne déballez pas tout en même temps, ça vous aidera à remporter ou à donner ce qui n’a pas été consommé sur place.  À ce titre une pomme est plus pratique qu’une compotée, une tablette qu’une mousse ! 

À la fin, tout doit disparaître : déjà parce que vous êtes fatigué·e et que devoir gérer l'empaquetage ou la distribution des denrées après une journée d’animation peut finir de vous mettre sur les rotules. À ce titre, vous pouvez demander aux participant·es en amont de venir avec des tupperware pour elles ou eux ou pour des personnes qu’ils connaissent ou croisent. Assurez vous de mettre les denrées bien visibles avec une pancarte explicite près de la sortie accompagnée de quelques cartons. 

Pour que vos participantes et participants se familiarisent avec le donut, vous pouvez les diriger vers un atelier 2tonnes version donut juste ici.

Le brief avec les prestataires

Pour embarquer les prestataires dans votre combat, voici une dernière liste de conseils. 

Vérifier les installations et le matériel. Prenez le temps de visiter le lieu pour vous enquérir des distances et des installations. Repérez le quai de déchargement et les conditions d’accès ainsi que la présence de diables ou de chariots, apprenez à faire fonctionner l’évier, les différents appareils électroménager, notez la présence ou non de vaisselle ou de carafe. Développez et entretenez une relation de confiance avec le régisseur du lieu qui vous accueille afin qu’il soit en confiance quand vous lui proposerez des aménagements à sa routine.

Parce qu’il y a de fortes chances que vous fassiez appel à des prestataires extérieurs ou à des foodtrucks qui pourraient venir avec un cortège d’emballages plastique, vous pouvez mettre en place un système pour leur substituer de la vaisselle lavable mais il y a des chances pour qu’ils soient réticents. Heureusement, le site zero waste explique comment les sensibiliser et les convaincre :  il faut communiquer clairement en amont aux clients et prestataires et  s’assurer que tout le monde présente des emballages propres, secs et adaptés à la contenance.

Enfin, faites des propositions aux acteurs conventionnels. Parfois le prestataire vous est imposé ou vous allez au plus rapide. Même dans ce cas, il est possible de s’enquérir de ce que votre prestataire propose comme offre solidaire ou circulaire ou de lui proposer de franchir le pas. Moi par exemple, parce que je ne trouvais personne pour nous fournir du pain en forme de Donut dans des délais et des coûts possible, j’ai proposé à l’entreprise PANIDEM de proposer une variante Bio et me suis engagé à lui faire une pub du tonnerre et à passer par elle pour nos futures commandes si elle développe une gamme bio. Deal !

Parfois pour avoir une politique d’achat qui jongle avec toutes les contraintes techniques, sociales et environnementales, c’est un vrai grand écart, mais les participant·es en tirent beaucoup de satisfaction.