Les conseils de Ta mère nature pour mettre du vivant partout dans ta ville

Les conseils de Ta mère nature pour mettre du vivant partout dans ta ville

La nature en ville, elle en connaît un rayon. Voici les astuces d’Ophélie Damblé, Ta mère nature pour nous connecter au vivant quand le béton semble partout.
27 February 2024
par Hélène Binet
5 minutes de lecture

Ophélie Damblé, alias Ta mère nature, agricultrice urbaine youtubeuse et bien plus encore, a plein d’idées pour se rapprocher du vivant même quand on habite au 8e étage avec vue sur grands boulevards. Petit florilège.


Retrouver sa curiosité d’enfant (vive les questions pas si bêtes !)


Ça marche comment ce truc ? Et cette plante elle pousse comment ? Quand on a 5 ans on se pose plein de questions sur le monde. Et quand on est grand, on lâche l’affaire ? “Ma reconversion je l’ai faite parce que je ne savais pas comment poussait une tomate et que j’avais envie d’apprendre,” témoigne Ophélie qui adore enchaîner les pourquois. L’influenceuse recommande de se poser mille questions, de creuser les sujets en profondeur et surtout d’expérimenter. “Ma pépinière n’est pas ultra productive mais elle permet de comprendre comment sont fabriquées les choses.” Pour saisir le vivant, faire le lien entre les éléments, Ophélie conseille de se lancer dans les semis et d’y plonger la tête la première en commençant par récolter les graines de sa tomate, les faire sécher, les planter, arroser, regarder ce qui se passe et ajuster. “Tu commences en février et dans le meilleur des cas tu récoltes ta première tomate en juillet. Tu retrouves le temps long, tu testes sans but productif, après c’est sûr tu ne regarderas plus jamais les tomates de la même manière.” Son tuto “les 5 erreurs à éviter si tu débutes dans les semis” vous offrira peut-être même la chance de voir quelque chose sortir de terre.

Une fois le virus des semis attrapé, vous pouvez rejoindre un jardin partagé pour biner en collectif ou devenir bénévole pour une association d’agriculture urbaine. À Paris et à Nantes par exemple, la Sauge ouvre les portes des ses fermes urbaines à celles et ceux qui souhaitent venir jardiner (pour s’inscrire c’est là).


Faire des choses gratuites et inutiles (t’as déjà vu un animal sortir sa CB ?)


Dans la nature, on ne connaît pas la question de KPIs et ROI (vous non plus ? La chance, vous ne travaillez donc pas dans une start-up). Dans le monde animal et végétal, il y a plein de choses inutiles qui semblent exister uniquement pour la beauté du geste : des trèfles à 4 feuilles, des arcs en ciel, des nuages aux formes imaginaires… Et si on s’inspirait de cet altruisme pour agir par panache ou poésie. Jean-Pierre Siméon dans son petit opus “la poésie sauvera le monde” écrit : “pour prévenir les troubles de la vision du réel, lisez un poème par jour.” Dans le même esprit, Ophélie conseille de tester quotidiennement le vagabondage de nos actes comme nos idées. “Faites des choses inutiles et gratuites, du vélo, du dessin, des siestes dans les parcs et mettez-vous au guerilla gardening.” La pratique qui consiste à végétaliser des petits ou grands morceaux de la ville à coups de bombes de graines ou de graph végétaux permet de poser un regard nouveau sur son lieu de vie. “C’est un acte désintéressé et souvent éphémère, prévient la spécialiste. Ce qui compte c’est le moment de l’action, la photo de ta réalisation mais surtout le plaisir de l’avoir fait. Tu as une archive et tu découvres ta rue et ses fissures. Ça transforme ton rapport à la ville.”

Allez hop par ici le tuto de Ta mère nature pour fabriquer ses bombes à graines.


Refuser le plus possible de neuf (circulez, y’a tout à voir)


Ne cherchez pas : le vivant est champion toutes catégories du recyclage. Les déchets des uns sont les ressources des autres et réciproquement. Dans la nature, tout a plus ou moins une deuxième ou une troisième vie et personne n’a besoin d’aller au paradis pour se réincarner. Et ça c’est carrément inspirant pour Ophélie pour qui le jardinage zéro déchet est un acte politique. “En recyclant, tu ne donnes pas d’argent à des grosses boîtes qui se gavent.” Son décalogue de jardinière écrit : 

  • L’eau de pluie tu récupèreras (dans des récupérateurs officiels, des bacs ou autres contenants)
  • Le compost tu produiras (à partir de tes épluchures et autres déchets)
  • Les graines tu récupèreras (dans les grainothèques, les banques de troc…)
  • Les contenants tu glaneras (dans les cimetières, les poubelles ou auprès des fleuristes)
  • Les fleurs sauvages tu accueilleras (dans les pots sur le rebord de tes fenêtres grâce aux graines portées par le vent)
  • Les feuilles mortes tu chériras (et tu iras les récupérer dans les parcs et jardins contre un sourire aux jardiniers de la ville)
  • Les bonnes espèces tu planteras (après avoir observé ce qui pousse dans ta ville grâce à Pl@ntnet, le shazam des plantes 


Rejoindre un structure coopérative (tu me donnes, je te donne, on avance)


Voilà un truc que la nature aime bien : coopérer plutôt que de se tirer  la bourre. Vous connaissez le pacte entre l’anémone et le poisson clown ?  L’anémone de mer sert de refuge au poisson clown et le protège des prédateurs quand en échange, celui-ci nettoie ses tentacules des parasites et des restes de repas. Win-win comme on dit. Bref, la coopération c’est beau et ça peut exister dans la ville aussi. Ophélie aime bien les supermarchés coopératifs par exemple. Ça vous parle ? Ce sont des magasins où les clients sont co-gérants et participent ainsi à la vie de l’établissement tous et toutes ensemble. Moyennant deux heures de bénévolat par mois, les coopérateurs et coopératrices ont des prix réduits toute l’année.

“Dans le même esprit, rappelle Ta mère nature, les coopératives d’activités et d’emploi (CAE) sont aussi à fréquenter quand on bosse à son compte. Elles proposent un modèle d’entrepreneuriat salarié unique, qui permet de créer et de développer sa propre activité au sein d’une structure collective et coopérative.” Terminé les journées à procrastiner en pyjama, les indépendants participent désormais à la vie d’une entreprise partagée. Il existe plus de 150 CAE en France, Coopaname à Paris, Oz à Angers, la Maison de l’initiative à Toulouse… 

Enfin, les coopératives d’habitat sont aussi de super modèles. En gros, on achète un logement à plusieurs et on partage plein de commodités : laverie, chambre d’amis, salle de teuf… Selon les formules, on peut aussi être locataire. Dans tous les cas, les décisions se prennent en commun et on y invente une autre vie plus écologique, solidaire. Très développé en Suisse (5% des logements sont sous cette forme), en France, on tâtonne encore un peu. 

Pour rejoindre un supermarché coopératif, cette carte nationale est assez pratique.

Pour voir toutes les coopératives d’activités et d’emploi, c’est par là. 


Parler aux gens qui ne nous ressemblent pas (c’est ça la vraie biodiversité)


Devinette : combien de variétés de pommes existe dans le monde ? 20 000 et pourtant en France, seulement quatre d’entre elles représentent les 2/3 des ventes. Et si c’était pareil avec nos relations ? Et si les algorithmes ne faisaient que renforcer l’entre soi et appauvrissaient notre façon de voir le monde ? Pour enrayer l’endogamie, ennemi numéro 1 du vivant, Ophélie conseille de se tourner le plus souvent possible vers des personnes qui ne nous ressemblent pas, de rejoindre des associations où prime l’intergénérationnel, d’aller frapper à la porte de ces voisins qu’on ne connaît pas, d’aller à la rencontre des personnes réfugiées. En somme d’être cette petite graine qui se laisse porter par le vent pour découvrir d’autres territoires d’actes et de pensée. Chiche ?