makesense puissance 10 : Nivologie, arithmétique et projet de société

makesense puissance 10 : Nivologie, arithmétique et projet de société

makesense puissance 10 : Nivologie, arithmétique et projet de société - makesense
18 November 2020
par Hélène Binet
4 minutes de lecture

C’est un pari aussi mathématique que sociologique. Se dire que lorsque 10% d’une population ouvre une brèche, c’est la société toute entière qui s’y engouffre. Miser sur une mobilisation exponentielle pour rattraper le temps perdu. Et croire encore et toujours qu’un monde durable et inclusif est possible. Vous connaissez makesense puissance 10 ?

Imaginons que vous soyez à la montagne, il a neigé, c’est beau, c’est blanc. Vous prenez un peu de neige dans vos mains, formez une petite boule bien compacte. Vous la posez sur le sol, la faites rouler sur elle-même, doucement. Vous observez avec tendresse ces petits flocons qui viennent s’y agréger. En quelques minutes, votre boule de neige passe de la taille d’un pamplemousse à celle d’une pastèque. Vous poursuivez. Vous voilà avec un ballon de yoga floconneux. À mesure que votre boule grossit, elle attrape de plus en plus de flocons dans son sillon. C’est magique, chaque nouvelle couche de neige amassée lui permet d’attraper toujours plus de neige et il en va ainsi à chaque révolution. Il vous faut désormais réunir du monde pour pousser cette boule qui vous dépasse. Vous êtes 2, 5, 10, 25, vous dévalez la pente entraîné.es par votre énorme masse neigeuse qui finit par poursuivre sa course toute seule de plus en plus vite, de plus en plus grosse, de plus en plus vite, de plus en plus grosse…

Avec vos moonboots à 2500 mètres d’altitude, vous venez d’expérimenter la théorie de l’effet boule de neige selon laquelle un élément mineur devient un événement majeur par effet d’accumulation. Ou pour celles et ceux qui n’ont pas séché les cours de terminale S un truc comme : f(x) = exp(x) = ex, soit une fonction exponentielle.

Organiser la mobilisation

La métaphore neigeuse est au cœur de la théorie du changement de makesense pour la prochaine décennie. Il s’agit pour l’organisation qui vient de fêter ses 10 ans de mobiliser, à l’horizon 2030, 10% des jeunes pour qu’ils puissent faire basculer la société du bon côté de l’horizon. L’idée est non seulement de démultiplier le nombre de personnes qui agissent, mais aussi de les former à rendre leurs actions efficaces et surtout de mobiliser autour d’elles pour créer ce fameux effet boule de neige. “L’objectif final est de permettre à leurs solutions de toucher le cœur du système en les coordonnant et en diffusant de nouvelles méthodes de coopération à tous les secteurs, expliquent en chœur Léa Zaslavsky et Alizée Lozac'hmeur, deux des co-fondatrices de l’organisation libérée. Nous pensons que rien ne résiste à l’engagement collectif et massif et c’est dans cette dynamique que nous voulons engager tous celles et ceux qui partagent nos utopies.”

Y aller par 4 chemins

Pour parvenir à cette mobilisation exponentielle, makesense a pour 2030 un plan en quatre actes et une conviction : le changement sera systémique ou ne sera pas.

L’acte 1 invite les individus à se retrouver dans la fabrique de la mobilisation citoyenne, le cœur du réacteur des programmes-maison. D'un jour ou d'un mois, ils permettent à des centaines de milliers de citoyen.nes de comprendre les enjeux de société, de passer à l'action efficacement et de mobiliser d’autres personnes autour d’elleux. La formule magique de la fabrique tient en cette phrase : une personne engage 10 personnes qui elles-mêmes engageront 10 personnes et ainsi de suite. Vous voyez l’idée ? “Nous souhaitons simplifier et personnaliser l’accès à nos opportunités de mobilisation grâce à une infrastructure digitale performante et dans le même temps démultiplier nos capacités de formation et d’autonomisation de nos mobilisateur.rices bénévoles,” précisent Lauren Miller et Tom Van den Maegdenbergh forces vives de la mobilisation citoyenne chez makesense. Ce dispositif devrait permettre d’engager 10 millions de citoyen.nes sur des sujets environnementaux et sociaux d’ici 2023. 

L’acte 2 est davantage réservé aux professionnel.les qui souhaitent accompagner les porteur.ses de solutions mais aussi sur ce qui fait la spécificité de makesense depuis ses débuts : la communauté. Cet ovni organisationnel parce qu’il unit et organise des énergies diverses autour d’un objectif commun, permet d’accélérer la diffusion, l’appropriation et la mise en œuvre de nouvelles idées par le plus grand nombre. “Nous créons des communautés engagées depuis une décennie, explique Solène Aymon, spécialiste de la question chez  makesense. Nous souhaitons renforcer le cadre théorique de ces années de pratiques et formaliser nos enseignements empiriques pour les transmettre au plus grand nombre au sein d’un campus des communautés. Nous espérons ainsi former plus de 50 000 professionnel.les ces trois prochaines années.” 

De quoi est fait l’acte 3 ? De coalitions. De la grosse boule de neige qui déclenche une avalanche de changement. De “l’union fait la force”. De “tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin”. “L’action citoyenne et la mobilisation de tou.tes les acteur.rices n’a de sens que si elle est orchestrée vers un but commun, rapportent Basile Michardière et Maud Ridoux coordinateur.rices des coalitions. La somme des engagements individuels doit s’organiser dans des mobilisations collectives. Nous souhaitons construire des coalitions thématiques larges pour nous donner les moyens du changement systémique.” Adieu les silos, voici les communautés d’action ! La première coalition orchestrée par makesense pourrait bien porter en 2021 sur un pacte des générations ou comment permettre aux aîné.es de retrouver une place enviable dans notre société.

Enfin, l’acte 4 qui pourrait être l’acte 0, le prologue ou la répétition générale de la pièce. Il consiste à “faire ce que l’on dit et ce que l’on fait” et permettre à makesense d’éprouver dans sa propre organisation toutes les valeurs enseignées ailleurs : les expériences dans la vie réelle, la frugalité, la joie, la curiosité, la bienveillance, le croisement des regards et des approches. “Nous allons prendre tous ces ingrédients pour vivre et expérimenter pendant 10 ans la transition au sein de notre propre organisation et montrer qu’elle nous rend heureux et libres,” concluent Mathilde Thorel et Coralie Gaudoux ferventes défenseuses de la gouvernance partagée. Les batailles de boules de neige feront-elles partie de l’expérimentation ? À ce jour, l’organisation n’a pas encore tranché.