Vesto récupère du matériel professionnel partout en France pour les reconditionner et proposer des équipements haut de gamme à des prix accessibles.
Vers une économie de la fonctionnalité
La circularité et la seconde main doivent pleinement faire partie de notre économie, Bastien, Wilfrid et Anne-Laurène en sont convaincus. La réduction des déchets et le reconditionnement seront au cœur des nouveaux modèles d’entreprises qui perdureront. En 2019, Bastien est tout juste sorti d’un projet de conserverie dans les Yvelines, c’est un féru de cuisine. La restauration, ça le fascine. Son infrastructure aussi. Avec ses deux amis, ils décident alors de commencer par là : on cuisinera avec des équipements issus de l’économie de la fonctionnalité.
La proposition est simple. Chez Vesto, on remet en état et en service. Pas de brevets ni de technologies hyper développées : on fait. On récupère (en débarrassant les ancien·nes propriétaires d’électroménagers lourds), on répare et on redistribue, en préservant la qualité du matériel. Des réfrigérateurs ou des lave-vaisselles sont retapés puis revendus à moindre coût. Un modèle gagnant/gagnant pour l’ensemble de la chaîne.
Car quelque part entre l’ère industrielle et celle de l’intelligence artificielle, on a perdu l’habitude de réparer. On préfère jeter et racheter. Il y a un vrai enjeu à faire reconnaître la proposition de valeur du reconditionnement. C’est plus écolo, moins cher et tout aussi fiable. Comment redynamiser une économie de la fonctionnalité ? En faisant émerger un métier aux savoir-faire anciens : les reconditionneur·ses.
Comment on fait ?
S’inscrire dans la circularité nécessite de renouer avec les compétences manuelles et industrielles. D’abord, il faut repenser les métiers. Revenons-en à l’histoire de l’industrie. Hier, pour monter une usine, on s’installait dans un village, on créait des relations avec la mairie, on formait les habitant·es et on faisait en sorte qu’ils souhaitent rester dans l’entreprise. L’ancrage territorial ne laissait pas la possibilité de faire autrement. Pour former leurs reconditionneur·ses, Vesto fait un choix similaire : l’équipe travaille directement avec le lycée professionnel du coin. L’entreprise accueille des jeunes en bac pro pour leur stage de seconde, première et terminale et les forme au métier du reconditionnement en parallèle des cours.
En 2024, Vesto a accueilli sa première 'promotion complète' de salarié·es : des étudiant·es ayant effectué leurs trois stages au sein de l’entreprise. Le lien fort avec le lycée permet d’assurer un vivier de nouvelles recrues sur le long terme, des vocations sont créées et dans une dynamique engagée qui plus est.
Plus que l’opposition entre le neuf et le reconditionné, Vesto lutte contre l’idée de l’obsolescence programmée. Les produits que l’on doit acheter sont ceux qui ont été pensés pour durer. Alors on déconstruit les imaginaires qui pensent consommation avant prolongation. Pour cela, Vesto visibilise les marques avec lesquelles ils travaillent, pour mettre en lumière des modèles circulaires qui marchent.
Objectif : que les fabricants de matériel haut de gamme, conçu pour durer, tirent leur épingle du jeu devant l’émergence du low cost. Par ailleurs, les restaurateur·ices restent généralement fidèles à leurs fabricants de matériel. En leur donnant accès à du haut de gamme reconditionné, Vesto leur permet de tester ces équipements, augmentant ainsi les chances qu’ils se tournent vers les mêmes marques pour les achats neufs si nécessaire. L’économie de la fonctionnalité, c’est une histoire de fidélité.
Respecter ses limites à tous les échelons
Ces lignes rouges pour Bastien vont bien au-delà du respect des limites planétaires. Les limites financières et humaines sont tout aussi primordiales pour faire advenir une nouvelle économie. Avant même de fonder Vesto, l’entrepreneur s’est fixé un seuil financier personnel à ne pas dépasser dans sa vie. Selon lui, le patrimoine financier devient trop facilement un ingrédient phare dans la motivation d’une aventure entrepreneuriale. Alors qu’on entreprend avant tout pour le changement.
En se posant cette limite mentale, Bastien résout une dissonance cognitive : celle de savoir que les inégalités économiques nourrissent intrinsèquement la crise environnementale que nous traversons. Sans objectif de croissance financière, entreprendre redevient un jeu et une raison d’être sans contradiction interne entre ce qu’on défend et ce qu’on vit. Se poser des limites pour respecter celles de la planète et construire une économie sobre et fonctionnelle est un enjeu qui se joue à toutes les échelles.
Les conseils de Bastien à l’entrepreneur·se en devenir :
- Il faut trouver un équilibre entre le succès de son projet et la redistribution de l’argent. Dans le cas de Vesto, on a d’un côté besoin de réduire les déchets de restauration et de l’autre un enjeu de ne pas concentrer les richesses. C’est assez facile en interne en proposant des salaires justes pour toutes et tous, mais c’est plus compliqué en externe. Il faut veiller à la juste rémunération de chaque acteur·ice et à acheter/vendre le matériel à sa juste valeur.
- Rester intègre. Ce qui conditionne les décisions chez Vesto, c’est s’adapter ou agir pour avoir plus d’impact. Aujourd’hui, les salarié·es sont globalement autonomes dans leurs prises de décisions et sont encouragés à dire non quand ils ne se sentent pas alignés. Par exemple, en faisant 12h de train pour aller à un salon au fin fond de l’Espagne car l’avion n’est volontairement pas une option, ou simplement refuser de s’y rendre si ce n’est pas justifié.
- “Les gens sont imparfaits, et c’est ce qui les rend parfaits”. On a trop tendance à vouloir lisser les choses et les gens, alors qu’on gagnerait tous à assumer nos bizarreries, et à donner du sens à nos imperfections. Alors faisons-le.
Pour aller plus loin
🎧 Se fixer des limites - Bastien Rambaud
Cet article a été conçu avec le soutien de la Fondation Entreprendre dans le cadre de la transformation de l'incubateur makesense vers un modèle d'accompagnement d'entrepreneuriat 100% vivant.



