Faire de la restau’co une transition collective

Faire de la restau’co une transition collective

Nos cuisines s’organisent ! Tour de piste des solutions de restauration collective sur le chemin de la transition agricole et alimentaire.
09 October 2025
par Paloma Baumgartner
5 minutes de lecture

L’alimentation est en pleine transition, la restauration collective aussi. Quels acteurs pour l’écrire au menu de nos cantines ?  Tour de piste.

La restauration collective, c’est 3,4 milliards de repas par an. Derrière ces assiettes se trouvent beaucoup d’enfants - 7,4 millions d’entre eux mangent à la cantine régulièrement, ainsi qu’un nombre important de seniors et patient·es en établissements médico-sociaux. La “restau’co”, c’est aussi un marché économique, avec des achats alimentaires qui dépassent les 7 milliards d’euros. Un moteur économique incontournable pour l’activité agricole et le développement territorial. 

Mais, la restauration collective fait face à un tournant : celui d’une alimentation en pleine transition. Son impact sur la santé physique et mentale est davantage mesuré. L’obésité chez les juniors et la dénutrition chez les seniors préoccupent les acteurs de santé publique. L’adaptation des régimes et pratiques alimentaires aux défis environnementaux devient, elle aussi, urgente. 

Côté législatif, des mesures sont votées pour accélérer l’évolution des cantines vers une démarche de durabilité, résilience et santé. Les lois EGalim (2018, 2021) imposent des objectifs ambitieux, comme celui d’avoir 50% de produits de qualité et durable dans les cantines, dont 20% en bio, ou celui d’instaurer un menu végétarien hebdomadaire. La loi Climat et Résilience (2021) impose quant à elle des contraintes au niveau du gaspillage alimentaire, de la gestion des restes, de l’usage du plastique et de la durabilité plus globale des pratiques. On peut aussi rappeler les obligations de la loi AGEC (2020) sur la restriction de l’usage des plastiques à usage unique. 

Les bonnes nouvelles : le bio n’est pas forcément plus cher, car on réduit les coûts ailleurs : lutte contre le gaspillage, mise en place de menus végétariens, soutien au transport local. 1,4 milliard d’euros de chiffre d’affaires pourrait être généré par la filière bio en atteignant l'objectif de la loi EGalim. La transition alimentaire favorise non seulement une meilleure santé et préservation environnementale, mais permet aussi de renforcer les liens territoriaux et créer de la cohésion sociale. 

Les cuisines s’organisent

Face à ces enjeux, les cantines se tournent vers de nouveaux modèles. Des solutions se créent sur toute la chaîne de valeur pour construire un circuit de la restauration collective sain et pérenne. Des acteurs, comme la Banque des Territoires, se lancent aux côtés d’initiatives qui mettent le bon sens au cœur de l’assiette. 

Parmi elles, voici quelques pépites, épinglées par Juliette D’Angelo, Responsable Investissements et spécialiste de la transition agricole et alimentaire au sein de la direction de l’Investissement de la Banque des Territoires. 

“La transition agricole et alimentaire ne se décrète pas, elle se construit. Elle repose sur la capacité des territoires à structurer des filières locales solides, à encourager la transformation à la ferme, à outiller les cantines, à végétaliser les menus et à réduire le gaspillage à chaque étape. C’est en reliant ces dynamiques — du champ à l’assiette — que la restauration collective devient un levier exemplaire de souveraineté, de cohésion sociale et de transition écologique” nous explique Juliette D’Angelo.

Sur les enjeux anti-gaspi , on retrouve : 

Celle qui fabrique de la valeur à partir du gaspillage : Les Jardins de Solène. Elle transforme les fruits et légumes déclassés ou invendus en produits prêts à consommer, tout en favorisant l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap. 

Celle qui mise sur le fait-maison et inverse la chaîne de valeur de la restauration : La Fabuleuse Cantine. Elle transforme des invendus bio, achetés à des partenaires situés à moins de 80 km à vol d’oiseau, en une cuisine créative, de saison, savoureuse et accessible. 

Sur les enjeux de structuration de filières locales, on retrouve : 

Celle qui développe un réseau de légumeries-conserveries à travers la France : Cuisinons nos Paysages. L’organisation crée et accompagne les infrastructures locales pour transformer et conserver les légumes, en pérennisant ces activités de production. 

Celle qui équipe la filière laitière bio : DelaFerme. Elle alimente un réseau de micro-laiteries fermières avec des équipements industriels et un suivi opérationnel, pour produire et commercialiser un yaourt bio en circuit court accessible à tous. 

Celle qui accompagne l’industrialisation durable des fermes : RESAN. Cette entreprise installe des conteneurs transformés en mini-usines dans les fermes, pour diversifier et valoriser les activités agricoles des producteurs. 

Sur les enjeux de circuits courts, on retrouve : 

Celle qui réinvente les circuits-courts  : Alternoo. Cette entreprise alimente une filière de distribution bio entre 30 producteurs normands et des acteurs alimentaires engagés de l’agglomération parisienne. 

Celle qui met le végétal au goût du jour : Excellent. À partir notamment du soja français, l’entreprise s’engage dans la production de protéines végétales, bio, sourcées et fabriquées en France, en B2B pour la restauration collective.

Sur les enjeux des cantines durables, on retrouve : 

Celle qui repense l’emploi dans la restauration : La Table du Récho. Ce service traiteur accompagne des personnes réfugiées dans leur parcours d'apprentissage aux métiers de la restauration responsable.  

Celle qui crée, active et anime un réseau de cantines durables : nona. Elle outille les cuisiniers de restauration collective et les accompagne dans leur transition alimentaire, en facilitant l’opérationnel, l’accès aux financements et le choix de pratiques durables. 

Un mouvement qui concerne tous les acteurs 

Il reste quelques grands défis pour accélérer la transition alimentaire de notre restauration collective : le soutien de l'État, les flux de financements, l’engagement de néo-entrepreneurs, la pédagogie auprès des acteurs du secteur; etc. Mais les cantines s’organisent. Nona vient de sortir un livre blanc, rempli de fiches pratiques en partenariat avec de multiples structures engagées (Agence bio, Réseau Manger Bio, FNAB, Cap Veggie, Cuisinons nos Paysages, Vesto, Kikleo, l’Interbio Nouvelle-Aquitaine, le réseau Restau’Co, AGORES & SNRC, etc.) pour activer la transition de la restau’co. Les solutions se multiplient, la filière se structure.

Pour soutenir ce mouvement qui prend de l’ampleur, des champs jusqu’au coup de fourchette, des acteurs comme la Banque des Territoires s’engagent. Avec son programme Territoires Nourriciers, opéré avec makesense et ses partenaires incubateurs du Kiif (pionniers de l’innovation sociale dans les territoires), elle accompagne ces solutions dans leur financement, leur mise en réseau et l’amplification de leur voix en faveur de la transition agricole et alimentaire. 

“À la Banque des Territoires, nous avons lancé le programme Territoires Nourriciers, qui permet d’accélérer et de financer des structures de la transition agricole et alimentaire, afin de créer les conditions d’une économie agricole et alimentaire durable et résiliente.”  ajoute Juliette D’Angelo. Les candidatures sont évaluées en continu et tous les acteurs émergents de la transition agricole et alimentaire sont les bienvenus. 

Les solutions Territoires Nourriciers qui font bouger la restauration collective :